Forbidden lands est un jeu de rôle sortie récemment qui a de quoi intrigué. Même s'il se veut de la mouvance Old School Renaissance (OSR), il ne l'est qu'à travers des illustrations noire & blanc de bon aloi et un univers médiéval fantastique très enlevé à base de magie puissante et autres engeances démoniaques. Cependant, dans son style de jeu, dans son moteur de résolution et dans son approche semi-bac à sable, il ne fait que s'éloigner des ancêtres du genre et des canons classiques du Med-Fan.
Il parait que les illustrations noir & blanc sont très "old school", moi je les trouvent très bien et même si elles m'évoques les illustration de la boite de base de D&D avec laquelle j'ai débuté, je les trouvent souvent plus pertinantes et efficaces que bien des illustrations en couleurs.
Le contexte
L'idée de départ c'est que vos personnages vont évoluer sur un territoire qui a été jadis recouvert d'une brume mortelle qui est en train de se rétractée. Son retrait laisse à nouveau la possibilité d'explorer des territoires qui sont restés un temps refermés sur eux-même. Cette catastrophe serait dû à une guerre livré par de puissants magiciens ayant libéré des démons et leurs pouvoir maléfiques qui ont altéré passablement les lois de la physiques classique dans les environs.
C'est pour moi le point faible de l'affaire. Car même si le pitch n'est pas trop mauvais, ça reste un univers clôt alors que la puissance du jeu aurait pu mériter mieux. Ça donne un certains relief et enferme les description et l’ambiance dans une rhétoriques stylée et typée alors que le moteur du jeu pourrait viser à l'universalisme ou presque. Mais vous l'aurez devinez, l'intérêt et l'originalité de Forbidden Lands réside ailleurs.
Il y a un indéniable volonté de féminiser les visuels ce qui est très moderne et très bien voir très agréables aussi pour diverses raisons que je ne détaillerai pas ici.
Les personnages
Les personnages se définissent par une origine (Humain, Elfe, Demi-Elfe, Nain, Hobbit, Gobelin, Orc, Wolfkin) qui sert principalement à définir les domaines privilégiés, une culture et surtout un pouvoir "racial". Vous avez alors le choix entre plusieurs professions : Druide, Guerrier, Chasseur, Ménestrel, Trafiquant, Cavalier, Filou et sorcier qui donnent accès à des pouvoirs spécifiques qu'il faudra néanmoins développer avec votre expérience. Chacune d'entre elle vous permet de choisir dans une liste un sombre secret et une fierté. Sombre secret et Fierté sont des éléments que le joueur pourra faire entrer en jeu ou invoquer durant la partie pour gagner de l'expérience supplémentaire ou relancer un jet de dès malheureux. C'est pas con et ça permet de fignole son personnage à moindre frais tout en donnant une couleur à son style de jeu et d'interprétation sans l'alourdir ou le contraindre de manière contre-productive.
Pas de demi-mesure dans ce jeu, on peut jouer des orcs et des gobelins sans passer par la très conventionnelle et politiquement correcte étape du demi-orc.
Ensuite il vous faudra répartir des scores (2 à 5) entre les 4 attributs qui vont définir les capacités d'action de votre personnage : Force, Agilité, Esprit et Empathie. et quelques points dans les 16 compétences (3 par attributs: Artisanat (F), Endurance (F), Mélée (F), Puissance (F), Déplacement (A), Discrétion (A), Adresse (A), Tir (A), Légendes (Es), Perspicacité (Es), Exploration (Es), Survie (Es), Influencer (Em), Représentation (Em), Soins (Em) et soins des animaux (Em).
Rajouter à cela un ou deux talents dans une liste fourni par un annuaire bien pensé et son équipement et vous aurez fini de définir les capacités de votre personnage.
Il y a trop de démon dans ce jeu. ça plait à certain mais la plupart du temps les démons me font chier.
Le système de jeu
Le système de jeu est simple et parait efficace sur le papier. Lorsqu'un personnage veut faire une action il lance autant de dès que la valeur de l'attribut dont dépend l'action auquel il rajoute autant de dés que son score dans la compétence concernée et quelques autres qui dépendent de l'outillage utilisé pour réaliser son action (objet, arme...) auquel peut venir se rajouter un dé spécial à 8, 10 ou 12 faces si l'objet en question est un puissant artefact magique. On lance le tout. Chaque 6 est une réussite. Obtenir un 6 avec sa main de dé permet de réussir l'action. Si on n'a pas réussi on peut forcer en relançant tous les dés sauf les 1 et les 6 obtenu lors du premier lancé. A l'issue de se second lancé de dés, on perd momentanément autant de point dans l'attribut concerné que de dés d'attribut ayant obtenu un 1. De même, les 1 obtenu avec les dés d'objet diminue la capacité de ce dernier, il s'use. Les 1 obtenus avec les dés de compétences n'ont aucune conséquence. D'où l'idée d'utiliser des dés de couleurs différentes pour bien le repérer facilement voir d'en acheter ou de s'en fabriquer des spéciaux pour faciliter une lecture qui n'est pas trop fastidieuse non plus.
Le dé d'artefact n'a pas de 1 non plus mais rajoute 1 réussite sur un 6-7, 2 réussites sur un 8-9, trois réussite sur un 10-11 et enfin 4 réussites d'un coup sur un 12.
La gestion des monstres avec leurs attaques spéciales et leur unicité ou presque est fort appréciable bien que dans les livres de base on n'y trouve que du plus classique. Ça donne cependant bien des idées pour en faire plein d'autres choses intéressantes.
Je ne vais pas détailler le système de combat mais sachez que la plupart du temps vos personnages vont avoir à combattre des monstres, souvent uniques, qui sont soumis à des règles spéciales. La principale étant que leur attaque se fait en lançant un D6 sur une table qui décrit le mode d'attaque du monstre. La plupart du temps, il est capable d'attaquer tous les personnages présents dans un même round. Du coup, ça évite pas mal de soucis et l'ensemble du groupe est orienté vers la destruction du méchant gros monstre. Un seul regret, c'est que ce système n'est pas été généralisé lorsqu'on rencontre des groupes d'adversaires. Ce sera sans doute la prochaine étape du future JdR qui révolutionnera le genre.
Je n'ai pas résisté au plaisir de me fabriqué mes propre dès spéciaux.
Le mode semi-bac à sable
L'originalité de Forbidden Lands réside également dans son mode d'aventure en semi-bac à sable. Le terme Bac-à-sable dans le milieu du JdR fait référence à un mode de jeu résident dans la description détaillée de l'espace de jeu des personnages qui choisissent ce qu'ils veulent faire sans être guidés par une trame narrative trop ténue et sénarisée. Ici, c'est une combinaison des deux modes. On retrouve le côté scénarisé dans le fait que les personnages vont découvrir un lieu limité qui peut être un donjon, un château ou un simple village entièrement décrit à priori. D'où le côté bac à sable. Le MJ n'a plus à décrire la trame d'un scénario et l'enchainement de scènes, mais l'ensemble des éléments (limités) qui composent son site d'exploration.
Le premier site proposé à la découverte de vos joueurs novices est un petit village resté trop longtemps isolé du reste du monde. Tous les "scénarios" sont construit autour d'une illustration globale du lieu en question. J'aime beaucoup.
L'exploration est d'ailleurs l'un des attraits du jeu. Vos personnages doivent parcourir les terres des Forbidden Lands pour découvrir ces sites à explorer et des règles simples et ingénieuses d'équipement et de voyage vont les accompagner et donner tout le sel du jeu. Il existe un système simple pour gérer les problèmes d'intendance comme vos torches, vos flèches, votre monnaie et vos aliments qui donnent du chrome à vos aventures et maintiennent une tension dans le groupe sans sombrer dans des comptes d'apothicaire.
Forbidden Lands et très appréciable pour son système simple de gestion des consommables élémentaires des aventuriers (nourriture, eau, flèche et torches)
Sur le même modèle, il y a également des règles pour que votre compagnie d'aventuriers construisent leur place forte, point de départ de leur renommée et de leur explorations. Ça rappel un peu Oltrée mais la gestion reste un peu compliqué au jour le jour et les règles de gestion du lieu lors de l’absence des PJ paraissent un peu trop contraignantes de prime abord.
Mais encore
Le jeu n'est pas encore traduit en Français, mais les bouquins sont de bonne facture et s'accompagnent d'une carte avec ses stickers de lieux à explorer à coller dessus au fur et à mesure de vos explorations. On trouve aussi des cartes pour vos objets magiques et une campagne forts dispensables bien que le jeu semble totalement construit autour d'elle. Ce que je trouve dommage car si cela permet de développer une ambiance originale, les qualités ludiques du jeu dépassent cet univers fermé à mon avis. Il y a la la base de faire quelque chose de beaucoup plus ambitieux, peut-être moins typé mais plus généraliste en tout cas. Je l'achéterai sûrement lorsqu'il sortira en français néanmoins.
Cependant, sachez qu'il n'est pas le premier à s'appuyer sur un tel système de jeu. La boite suédoise qui est à l'origine du projet a déjà commis Mutant année 0 (Anticipation post apocalyptique) et Tale from the Loop (Ambiance gonnies des années 80 version Strangers Things) qui sont également des réussites et qui eux, existent déjà en français.
L'une des choses les plus perturbantes de ce jeu, c'est cette couverture très Drakken Land alors qu'il n'y a pas la trace du moindre dinosaustopien dans les bouquins. Mais pourquoi ????